Justand Mots

Ecriture. Arts. Matière. Épaisseur. Hauteur. Sens. Saveur. Son. Musique. Rythme. Contraste. Images. Magie. Création. Forme. Echo. Vie. Âme. Imaginaire. Mots. Invisible. Artisan. Lettres. Lien. Amour. Infini.

DEMAIN

Publié le 11 Mai 2017 par Céline Justand dans Tempo

Demain, et après …

Pourquoi ne pas applaudir de plus près ?

A demain ! Sur deux pieds !

Avec notre morceau de piano bien accordé,

Notre duo à quatre mains

Fera l’ouverture demain,

Et après- demain,

Quand tu auras pris ma main.

Ça reste du par cœur pour nos dix doigts,

Sans impro,

Et de nos deux mains,

Lier un seul nom, pour deux cœurs.

Après-demain,

Ta main et ma main,

Pour deux paires de mains

Et dix doigts fois deux.

Ça fait huit doigts ?

Non.

Ça fait vingt doigts,

Qui joueront à vingt heures,

Samedi en huit.

C’est une sacrée paire de manches

Pour relever le défi,

Un beau morceau de main de maître.

Plus que deux mètres,

Mais demain,

La scène fera plusieurs dizaines de mètres,

Elle peut se compter en pieds,

Mais pas en mains.

Elle se mesure à l’aide d’un chef d’orchestre,

Un joailler d’harmonie mesurée,

Taillant avec deux mains et une baguette,

En un temps sans désaccord,

Une musique de grand maître qui prend son temps.

Hier, ou bien avant encore,

Il y avait déjà un demain,

Et un après-demain,

Qui se composent à quatre mains,

Ou bien plus,

Qui se précèdent,

Puis se laissent parcourir avec deux pieds,

Et une croche,

Qui double dès qu’on l’approche.

Si demain double sa croche,

Le morceau continue sa musique, son tempo,

Demain passe à après-demain,

Pour se souvenir l’instant où 

Tu as décidé de prendre ma main,

Pour vivre à deux nos lendemains.

 

Sculpture : Auguste Rodin

©ND

Texte : Céline Justand

(2015)

 

 

-Justand Mots-
 

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ETAT DES LIEUX

Publié le 11 Mai 2017 par Céline Justand dans Lieu

 

La table basse, les chaises de la cuisine, un petit meuble de salle de bain. Tout part. Plus de meuble.
Fenêtre grande ouverte, je regarde le camion plein s’en aller, s’en aller, s’en aller. Regard sur le grand platane, la brise traverse les feuilles. Silence. Rafale de vent. Forté, forté, forté. Tout décrocher. Demain matin, concours d’entrée au Conservatoire, première année.
Ré, mi, ré, la, sol. Ré, la, fa, sol, si, ré.
Tic, tac, tic.
L’horloge de la cuisine. Tic, tac, tic. Tempo.
Ne pas oublier. Décrocher. Tempo.
Les pièces vides sont plus grandes, même remplies par les souvenirs de mes douze années en famille. Douze ans depuis deux jours. Grand jour demain. Six années de piano. Poussière et silence à la place du piano enlevé. Traces de roulettes dans le bois du parquet.
Morceau de mélancolie. Tout raisonne. Se concentrer.
Fermer la fenêtre.
La poignée cassée tombe sur le parquet.
Son aigu, sol bémol qui résonne, résonne, résonne. Arpège.
Do, sol, do, ré, mi, fa, sol, sol dièse, la, si, do, si, do, sol, do, ré, mi. Ne pas oublier le forté pour le deuxième mouvement.
Ce lieu m’attache.
Mes souvenirs me font jouer faux dans ma mélodie intérieure. Ma cachette derrière la tapisserie, j’avais oublié. Stop.
Rester concentré, ma mélancolie jouera le morceau demain matin. C’est pas le moment.
C’est le moment, sonnerie de la porte d’entrée.
Un Mi. Un La.
Une autre clé posée. D’autres clés posées encore.
Clé de fa, double croche, et triolet. Accords.
Nous descendons les escaliers. Silence.
Chaque pas. Silence.
Chaque palier. Silence.
Si, sol, do, un pas. Fa, mi, do, ré. Silence.
Accords. Fermeture de la porte.
Pianissimo. Pianissimo. Pianissimo.

 

Texte : Céline Justand

(2016)

©Céline JUSTAND

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PELOTE DE LAINE

Publié le 11 Mai 2017 par Céline Justand dans Portrait

 

Pelote de laine à ses pieds, aiguilles à tricoter posées.
L’ouvrage est là, autour d’elle....

Chaque lien est solidement enlacé pour résister au gel, aux tempêtes bouleversant sa vie par instant. Un ouvrage qui lui tient chaud, comme une bulle toute faite pour elle, toute faite pour nous. Elle est épouse, mère, grand-mère, arrière-grand-mère, sœur, tante, grande tante, cousine, amie. Elle est tout à la fois. Elle est tout ce qu’une dame peut être. Elle est patronne à son poste.
L’ouvrage est là, autour d’elle.

Rapide et maîtrisé, le geste est précis, décidé, autoritaire. Main de fer pour aiguille en douceur, main de velours pour aiguille piquante, sa chaleur gagne en matière. Ne se laisse pas faire. Ne vous laisse pas faire. Sait tout bien faire. Sait bien faire taire. Sait bien se taire. Sait voir autour d’elle, dans tous vos recoins, vos cachettes.
L’ouvrage est là, autour d’elle.

Femme de tête, tout en intellect, conversation haut perchée sur la société, la politique, la philosophie, ou le dernier roman qui a traversé son avis. Femme d’un autre siècle, les années vingt, la jeunesse languedocienne, puis la guerre, l’occupation, la libération, le vote des femmes, la vie de mère au foyer et celle de femme autonome qui mit son mari une deuxième fois à ses pieds. Voici une femme digne, qui serre les dents, fronce les sourcils et continue sa tâche.
L’ouvrage est là, autour d’elle.

Suivant les lois de Dieu, croyante et pratiquante, elle cultive sa foi, son regard vers nos ancêtres lumineux. Les bras ouverts pour bercer le dernier né, la layette était déjà prête, son regard baissé guette le lien se tissant en un inconditionnel câlin. Les tout petits improvisent de nouveaux souvenirs, chacun est le fil doré, précieux trésor qui l’enveloppe. Elle respire dans leurs rires, à chaque époque. Son mari l’appelle, la cherche du regard, ne reste pas longtemps sans contact. Elle est là, tenant sa main fragile. Fabriquant l’ouvrage de leur vie, elle a laissé en nous une pelote de laine pour les liens déliés, les liens éloignés, les liens à créer, les liens à serrer.
Et pour se souvenir d’elle, regardez l’ouvrage autour d’elle.

 

Texte : Céline JUSTAND

(2016)

©Céline JUSTAND

-Justand Mots-

 

 

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DEGUSTATION EN PERSPECTIVE

Publié le 11 Mai 2017 par Céline Justand dans Lieu

De grandes vitres sales, hautes et grises laissant passer l’étendue de ciel, ce gris propre à Paris, qui fronce les sourcils, accroché au joli pinceau ramolli. Dans son atelier d’artiste tournoie une senteur de terre, de poussière et une féroce odeur de jazz qui glisse sur la jupe de la dame frôlant sa palette personnalisée depuis de longues années. Tonalité gris-bleutée. Goût métal. Pinceaux, pas rangés, dans le pot coloré.
Elle en oublie sa commande et admire le lieu ; les recherches de disharmonies, de contrastes, de matières, les parfums d’acétone, d’acrylique, de plâtre et de fruits dans la corbeille attirent les questions. Elle ne veut pas les réponses. Sous les doigts de l’artiste, les matières mélangent l’étrange. Il travaille cet absolu, cette différence qui gêne, cette recherche de saveurs visuelles et sensuelles fabrique le relief. Son regard d’expert guette la perspective et puise l’inspiration dans l’évidence, comme la dentelle trouve sa place au bord de cette bretelle.
Hauteur immense sous plafond, une place vide saturée de saveur : orange et touche de rose, saumon et mûre amère. Ça ressemble au doux la mûre amère, comme les mains gantées bien au chaud, au milieu d’une basse température couleur lilas foncé .
Un vieux canapé, au confort chiffonné, entouré de trépieds portant les toiles terminées, ébauchées, retouchées, superposées. Des toiles au sol, des toiles adossées au mur qui respirent la technique travaillée avec tact, la pertinence et l’iode du large. Un seul échange visuel donne le goût du voyage.
Un peu plus loin, tout au fond, un coin. Un coin discret. Les outils témoignent de la casse, du creusé, du ponçage, du détail minutieux, de l’élan gracieux dans un volume paresseux. Une commande cachée comme clochée, toutes les saveurs sont préservées. D’un vif mouvement, le tissu est enlevé, l’œuvre est présentée. C’est le buste.
Elle le déguste du bout du cil. Ça sent le jazz encore plus fort. Dégustation haut de gamme.

 

Texte : Céline Justand

(2016)

©Céline JUSTAND

-Justand Mots-

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SEPT HEURES

Publié le 10 Mai 2017 par Céline Justand dans Portrait

 

 

Son petit sac à ses pieds,
bien en place à sa place,
elle est assise à sa place,
dans ce train,
pour sept heures de trajet,
et sait très bien qu’elle n’est pas qu’un paquet à trimballer,
du bas de ses sept ans,
avec son petit sac à ses pieds.
Elle sait qu’elle n’est pas qu’un paquet,
qui tourne le dos à la marche en avant,
comme un temps empaqueté dans un paquet
qui n’avance que si on lui ordonne de marcher.
À l’heure où la sieste a commencé,
et les sept heures de trajet bien entamées,
la petite fille,
avec son petit sac à ses pieds,
sait qu’il n’est pas si facile d’être éveillée,
à sept ans à peine,
seule à sa place pour sept heures de trajet,
elle sait qu’elle est toute seule,
comme un paquet posé,
à sa place, bien posé,
pas de sieste mais sept heures de trajet.
Il fait encore jour pour quelques heures,
le regard se durcit d’heures en heures,
à travers la vitre, ses yeux,
de sept ans à peine,
regardent avec peine
ces sept heures étrangères.
Elle observe,
pas seulement parcequ’elle est seule,
comme un paquet,
posée près de son petit sac tout discret,
mais rien…
Pas de sieste, pas de goûter, pas de jouet.
C’est le choix de cet être inconscient
d’avoir déposé une petite fille
comme un paquet qui retourne à l’envoyeur,
parcequ’avec ses sept ans,
c’est pas assez grand ou c’est trop petit,
pas assez intéressant ou sans finesse,
pas assez amusant ou trop ennuyeux,
en tout cas c’est pas comme il faudrait
pour continuer des vacances de petite fille de sept ans.
Alors pendant sept heures de trajet,
comme un baptême sans dragées,
gardant ce silence sans sourire,
dos à la marche en avant,
le petit sac et les petits pieds ne vont pas bouger.
Alors que le temps avance
et que les espoirs s’arrêtent en route,
la peur, bien tranquille,
s’installe face à la nuit
et entoure le chaos du vide.
Le wagon se vide.
Gardant ce silence sans sourire,
face à la marche en avant,
le petit sac et les petits pieds vont bouger,
s’agiter, piétiner,
et s’évader du rigide paquet
collé à la place numérotée et imposée,
pour terminer ces sept heures de trajet
dans une tristesse de liberté.
La petite fille de sept ans se lève,
observe le vide,
les places abandonnées,
usagées, méprisées,
vacantes, désintéressantes,
qui ne sont pas les siennes,
alors que le train continue sa lancée,
elle avance,
le temps en pleine face,
son sac à dos dans son dos,
alors que l’heure du bain est passée,
et qu’il serait temps de dîner,
elle se place près de la porte de sortie.
Les sept heures seront bientôt écoulées.
Avec ses sept ans,
elle regardera droit devant, droit dehors, droit dedans,
avec son sac à dos bien droit,
dans son dos droit,
elle suivra sa ligne droite,
sa ligne libre, bien droite, bien libre,
dans le sens de la marche,
avec ces sept heures qui l’ont accompagnée,
avec les adultes qui ont tous fuis
qu’elle regardera bien en face,
droit devant, droit dehors, droit dedans,
avec son sac à dos bien droit dans son dos droit.
Tirant un trait bien droit
sur ceux qui ne veulent ni son bien,
ni son mal,
elle ne leur dira rien,
suivra son chemin tout droit,
droit devant, droit dehors, droit dedans,
son regard au loin,
son sac à dos bien droit dans son dos droit.
Avec ce silence sans sourire,
la petite, debout et droite,
arrive à bout,
à bout de ces sept heures
qui ont tué ses sept ans,
et son sac qui n’est plus petit mais bien là,
ce sac à dos, qui a grandi aussi,
bien droit dans son dos droit.
Les sept heures sont passées.
Elle descend du train
et abandonne comme un paquet
le cadavre de son enfance morte étouffée
d’être restée bien assise à sa place sans bouger,
avec le chaos à ses pieds.

 

Texte : Céline JUSTAND

(2016)

©Céline JUSTAND

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CHEMIN

Publié le 10 Mai 2017 par Céline Justand dans Écriture

 

 

Si mon écriture arrivait à écrire, elle dirait les sons, la musique, la vibration humaine. Chaque humain dans sa vibration. Quelle humanité et avec quelle musique. Une partition avec les mots, les images, les oreilles, et des sensations qui raisonneraient. Mon écriture arriverait à être mon écriture. Mon œil qui voit votre œil, et ils se répondraient. Une encre plongée dans cette sincérité de fond. Avec une forme, un fond, puis une forme encore qui jouerait tout au fond.
Quand mon écriture saura écrire, j’écrirai sur le monde. Victor Hugo ou Camus sont loin, ce ne sera que mon écriture. Mais elle apprendra à écrire grâce au monde étranger. Puis la contemplation.
Voir le monde. Ecrire l’intolérance. Celle du monde, la mienne, la vôtre. Puis la tolérance, la vôtre, la mienne, celle du monde encore. Ecrire encore. Et encore apprendre. Donner le goût d’écrire à ceux qui ont une voix pour dire. Pas de cri mais un seul mot : écrire. Pour l’autre. Avec l’autre. D’autres. Faire écrire.
Quand mon écriture écrira, elle tracera de l’écrire dans l’écriture.

 

Texte : Céline JUSTAND

(2016)

 ©Céline JUSTAND

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CANEVAS

Publié le 10 Mai 2017 par Céline Justand dans Écriture

 

Un canevas sans dessin, tout blanc, sans rien, ouvert à tous les univers, attend patiemment, pas impatient, déguste le temps qui sera bientôt matérialisé de points cousus....
Un point cousu, deux points cousus font un pas franchi par mon aiguille à bout rond, enfilée d’une couleur bleue pour l’instant, du vert puis du rouge un peu plus loin.
Cette idée qui n’était rien, commencée par un point, un petit pas, un petit temps, se transformera en matière, en texture, en couleur, en mouvement, elle sera mise à plat, à plat de couture et en image tapissée.
Le sens des fils est harmonieux, leurs nœuds sont bien cachés au dos de l’image.

 

Texte : Céline Justand

(2015)

 ©Céline JUSTAND 

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MEMOIRE SENSORIELLE

Publié le 10 Mai 2017 par Céline Justand dans Lieu

 

C’est une lumière de laboratoire, blanche, froide, autoritaire, efficace grâce aux néons, qui s’efforce de bien tout montrer, surtout le vide puis sa puissance. Elle éblouit suffisamment pour qu’il s’habitue au changement d’espace, la vision doit s’adapter à cette grande pièce avec une allée centrale et ces petits box cloisonnés à gauche et à droite. Ses yeux sont dans un inconfort agressif et luttent pour s’adapter à cette saturation de lumière, ce blanc froid qui dégouline sur les murs gris clairs laqués qui, eux-mêmes, se jettent sur le sol gris foncé brillant. Tout se reflète, tout ce froid rigide se répond partout, ce propre repoussant accueille le dégoût, et il faut avancer. Le Monsieur en blouse blanche lui a dit « -3ème box, à droite ! », dans toutes ces couleurs froides qui tirent les pensées vers le pire, au milieu de tous ces box vides, chaque pas tremble comme la corde qui cherche son accord dans l’atmosphère morbide qui joue de l’écho. Ça sent le frigo. Ou mieux encore, l’odeur de la chambre froide d’un boucher dans laquelle des carcasses sont pendues, bien dociles, bien rangées, bien rigides, toutes pleines de bonne chair et de fraîche mort, cet air envahissant de froid désinfecté qui dissimule la pourriture naissante. Son corps tout entier s’est rafraîchi comme solidaire du cadavre de son frère, confortable, lui, dans cette absence de tout qui lui est devenue familière : le box numéro 3 est là. Le corps est installé sur une table en métal, à roulette, recouvert d’un drap blanc assorti à cette lumière qui donne envie de hurler, le visage est tout gris assorti au mur qui donne envie de s’enfuir, alors qu’il s’en approche de plus près, un frisson parcourt son dos puis ses bras, comme une charge électrique qui donne envie de survivre. Dans son corps, à lui, il y a de la réaction, du langage, du mouvement, même si la chaleur descend, il sent une lutte qui lui rappelle sa vibration d’être encore vivant. Ce lieu serait-il plus fort qu’un lien de sang ? Rendrait-il immobiles et découpés tous ceux qui y entrent ? Il circule autour du défunt, de la table, et fixe ce visage qui est celui de la mort brutale ; un œil est presque ouvert alors que l’autre est bien fermé, c’est un visage qui n’avait pas terminé sa phrase. Il lui touche le front, semblable à un glaçon recouvert d’un fin tissus juste humide, fait un effort pour garder les doigts sur cette peau qui n’a plus rien à dire. Une information familière, un repère, un contact à quoi s’accrocher mais plus rien n’existe à cet instant, le « trop tard » est déjà loin. Cette peau n’est plus habitée, et la toucher c’est visiter une maison hantée, immense, dévorante, sombre, et dont on veut s’échapper au plus vite. Il enlève sa main. Il se crispe de froid, déglutir est difficile, comme si cette décomposition était contagieuse, se dispersait dans toute la pièce, à travers le sol, les murs, la lumière, la température, le silence, l’air, pour entrer à l’intérieur du visiteur de la morgue, pour que plus jamais aucunes sensations ne dépassent celle-ci, pour que la mort soit enregistrée comme familière, pour toujours, dans tous les sens, et que le chagrin ne soit rien à côté de la trace que laissera cette lumière saturée qui continue à éblouir de force même une fois sortie.

 

Texte : Céline JUSTAND

(2016)

©Céline JUSTAND

-Justand Mots-
 

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